Togo : Hommage interdit aux victimes de Bè, la société civile persiste

Togo Hommage interdit aux victimes de Bè, la société civile persiste
Credit Photo: ha.m.wikipedia.org

Un silence lourd de sens a tenté de s’élever mardi à Lomé. Mais il a été brutalement étouffé. Des partis d’opposition et plusieurs organisations de la société civile avaient prévu une marche silencieuse et un dépôt de gerbes sur les rives de la lagune de Bè-Houvémé, en mémoire des corps repêchés dans cette zone ces dernières semaines. Des corps sans vie retrouvés dans des circonstances encore floues, qui continuent de choquer l’opinion togolaise.

Malgré le caractère pacifique de l’action, les autorités ont de nouveau interdit la cérémonie. Initialement prévue le 14 juillet, l’initiative a été reportée au lendemain pour coïncider avec la fin de la campagne électorale municipale. Ce report n’aura pourtant rien changé à l’hostilité des forces de l’ordre. Dès les premiers pas de la marche, deux véhicules de police ont surgi. Des agents, certains cagoulés et sans signes distinctifs, ont immédiatement dispersé les manifestants, ordonnant même la récupération des gerbes destinées à l’hommage.

Ce geste répressif a été perçu comme une nouvelle tentative de museler la société civile. « Ce n’est pas la première fois que des manifestations pacifiques sont interdites au Togo », a rappelé le professeur David Dosseh, coordinateur du Front Citoyen Togo Debout. Selon lui, la présence d’agents non identifiables soulève des questions inquiétantes sur la transparence des forces déployées et l’environnement sécuritaire dans le pays.

Malgré l’intervention musclée, les organisateurs ont tout de même pu déposer symboliquement les gerbes à la lagune de Bè, lieu devenu tristement emblématique depuis la découverte de plusieurs cadavres dans les eaux du quartier. « Ce geste avait une portée humaine et symbolique. Même si nous n’avons pas pu marcher comme prévu, notre message est passé », a confié le professeur Dosseh, visiblement ému mais résolu.

Cette mobilisation silencieuse a vu la participation remarquée de plusieurs leaders politiques de l’opposition. Jean-Pierre Fabre (ANC) et Targone Sambiri N’Wakim (DMP) ont notamment fait le déplacement, soulignant la gravité du moment. Leur présence renforce la portée de cette initiative citoyenne et envoie un signal fort à l’opinion publique.

Mais ce rassemblement interrompu soulève une autre inquiétude : la multiplication de forces parallèles non identifiées. Alors que la FOSEM (Force Sécurité Élection Municipale) compte 12 000 agents officiellement chargés d’assurer la sécurité du scrutin, des unités non reconnues semblent désormais impliquées dans le contrôle de l’espace public, alimentant ainsi les soupçons de dérive autoritaire.

Pour la société civile, cette interdiction n’est qu’une étape dans un long combat. « Ce n’est pas la fin. Nous continuerons à réclamer la vérité et la justice », a promis le professeur Dosseh. D’autres actions pacifiques sont déjà à l’étude. Dans un contexte sociopolitique tendu, la population reste suspendue aux actes de ceux qui, malgré les interdictions, refusent de se taire.


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